Une dispute entre la Russie et les pays de l’UE sur les causes de la Seconde Guerre mondiale s’est intensifiée, avec un haut responsable russe condamnant l’ambassadeur américain en Pologne.
Le président du Parlement Viatcheslav Volodin a déclaré qu’un tweet de l’ambassadrice Georgette Mosbacher était « insultant » pour les Russes et les Américains.
Lorsqu’elle a tweeté lundi : « Cher président Poutine, Hitler et Staline se sont associés pour déclencher la Seconde Guerre mondiale. »
Le président Vladimir Poutine affirme que la Pologne et ses alliés déforment l’histoire.
Lors d’une conférence de presse marathon le 19 décembre, le président russe a déclaré qu’il était « totalement inacceptable et inexact » de blâmer à égalité le leader nazi Adolf Hitler et le leader soviétique Joseph Staline pour le déclenchement de la guerre.
M. Poutine a déclaré qu’il avait demandé des documents d’archives soviétiques afin d’écrire un article sur le sujet – l’invasion de la Pologne par l’Allemagne nazie le 1er septembre 1939 – et, selon lui, de rétablir la vérité.
Il a fait valoir que les puissances occidentales et la Pologne avaient apaisé l’agression d’Hitler en le laissant s’emparer de la Tchécoslovaquie en 1938.
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L’invasion nazie de la Pologne est intervenue une semaine seulement après que le ministre des Affaires étrangères d’Hitler, Joachim von Ribbentrop, et le ministre soviétique des Affaires étrangères, Viatcheslav Molotov, eurent signé le 23 août 1939 un pacte de non-agression qui a stupéfié le monde.
Une clause secrète du pacte découpait l’Europe de l’Est en sphères d’influence nazie et soviétique, permettant aux deux dictateurs – l’un fasciste, l’autre communiste – d’occuper et de démanteler la Pologne.
Le tweet de Mme Mosbacher rappelle que la Pologne a été victime des deux dictateurs.
Mais M. Volodin, qui est proche de M. Poutine, a déclaré que le département d’État américain devrait s’assurer qu’un ambassadeur tel que Mme Mosbacher a une connaissance suffisante de l’histoire d’un pays avant de l’y envoyer travailler.
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Monsieur Poutine a fait revivre les symboles soviétiques du temps de la guerre, et les portraits de Staline sont couramment affichés en Russie désormais.
En 2020, on marquera le 75e anniversaire de la victoire des Alliés sur l’Allemagne nazie.
Plus de 20 millions de citoyens soviétiques sont morts dans ce que les Russes appellent la « Grande guerre patriotique » après que les nazis ont envahi l’URSS en 1941. Le père de M. Poutine a servi dans la police secrète NKVD de Staline et a été gravement blessé à la guerre en 1942.
Le président Poutine a fait valoir que Staline avait essayé de forger une alliance anti-Hitler avec la Grande-Bretagne, la France et la Pologne, mais que les accords de Munich en 1938 – condamnant la Tchécoslovaquie – avaient fait capoter ce plan. Staline a alors dû conclure un accord avec Hitler, se sentant trahi par l’Occident, a-t-il fait valoir.
Toutefois, les historiens occidentaux soulignent que le pacte de non-agression nazi-soviétique signifiait qu’Hitler n’avait pas à craindre un affrontement avec l’URSS s’il envahissait la Pologne, lui donnant ainsi l’assurance dont il avait besoin.
De plus, Staline a ensuite fourni à la machine de guerre nazie des matières premières, ce qui a contribué à alimenter – littéralement – l’agression d’Hitler contre l’Europe occidentale.
Comment cette dispute s’est-elle envenimée ?
Lundi 30 décembre : Outre le tweet de l’ambassadeur américain, l’ambassadeur d’Allemagne en Pologne – Rolf Nikel – s’immisce également dans la dispute, en tweetant : « Le pacte Molotov-Ribbentrop a servi à préparer l’invasion criminelle de l’Allemagne nazie contre la Pologne. L’URSS, avec l’Allemagne, a participé à cette division brutale de la Pologne. »
29 décembre : Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki publie une déclaration accusant M. Poutine d’utiliser la question de la Seconde Guerre mondiale comme un moyen de dissimuler les récents revers internationaux de la Russie, tels que les sanctions sportives imposées en raison du dopage russe. M. Morawiecki affirme que « le président Poutine a menti sur la Pologne à de nombreuses reprises ».
27 décembre : Le ministère polonais des Affaires étrangères convoque l’ambassadeur russe pour protester, rappelant que la guerre a commencé avec le pacte nazi-soviétique, et que la Pologne a perdu environ six millions de citoyens pendant la guerre. Auparavant, M. Poutine avait méprisé la Pologne et les puissances occidentales pour avoir apaisé Hitler et avait qualifié l’ambassadeur de Pologne à Berlin dans les années 1930 de « porc antisémite ».
19 septembre : Une résolution du Parlement européen – politiquement significative, mais pas une loi – exhorte les États de l’UE à « faire une évaluation claire et de principe des crimes et des actes d’agression perpétrés par les régimes communistes totalitaires et le régime nazi ». Elle décrit la guerre comme « un résultat immédiat » de l’infâme accord nazi-soviétique de 1939.