Jusqu’après la Seconde Guerre mondiale, presque aucun des Africains vivant dans les colonies de la France n’était citoyen français. Ils étaient plutôt des « sujets français », dépourvus de droits devant la loi, de droits de propriété, de droits de voyager, de dissidence ou de vote. Les quatre communes du Sénégal constituent une exception : ces régions avaient été des villes de la petite colonie du Sénégal en 1848 lorsque, à la suite de l’abolition de l’esclavage par la Seconde République française, tous les résidents de France se sont vu accorder des droits politiques égaux. Toute personne pouvant prouver qu’elle était née dans ces villes était légalement française. Ils pouvaient voter aux élections parlementaires, qui avaient été jusqu’alors dominées par les résidents blancs et métis du Sénégal.
Les quatre communes du Sénégal avaient le droit d’élire un député pour les représenter au parlement français en 1848-1852, 1871-1876, et 1879-1940. En 1914, le premier Africain, Blaise Diagne, est élu député du Sénégal au Parlement français. En 1916, Diagne fait adopter par l’Assemblée nationale une loi (loi Blaise Diagne) accordant la pleine citoyenneté à tous les résidents des « quatre communes ». En échange, il a promis d’aider à recruter des millions d’Africains pour combattre dans la Première Guerre mondiale. Par la suite, tous les Africains noirs de Dakar, Gorée, Saint-Louis et Rufisque pouvaient voter pour envoyer un représentant à l’Assemblée nationale française.
Alors que les Français poursuivaient leur rôle dans la ruée vers l’Afrique dans les années 1880 et 1890, ils ont conquis de grandes régions intérieures et, au début, les ont gouvernées soit comme une partie de la colonie du Sénégal, soit comme des entités indépendantes. Ces régions conquises étaient généralement gouvernées par des officiers de l’armée française et surnommées « territoires militaires ». À la fin des années 1890, le gouvernement français a commencé à freiner l’expansion territoriale de ses « officiers sur le terrain » et a transféré tous les territoires à l’ouest du Gabon à un seul gouverneur basé au Sénégal, relevant directement du ministre des Affaires étrangères. Le premier gouverneur général du Sénégal est nommé en 1895 et, en 1904, les territoires qu’il supervise sont officiellement appelés Afrique occidentale française (AOF). Le Gabon deviendrait plus tard le siège de sa propre fédération l’Afrique équatoriale française (AEF), qui devait border son voisin occidental sur la frontière moderne entre le Niger et le Tchad.
Après la chute de la France en juin 1940 et les deux batailles de Dakar contre les Forces françaises libres en juillet et septembre 1940, les autorités d’Afrique de l’Ouest ont déclaré leur allégeance au régime de Vichy, tout comme la colonie du Gabon français en AEF. Le Gabon tombe aux mains de la France libre après la bataille du Gabon en novembre 1940, mais l’Afrique de l’Ouest reste sous le contrôle de Vichy jusqu’au débarquement allié en Afrique du Nord en novembre 1942.
Après la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement français entame un processus d’extension des droits politiques limités dans ses colonies. En 1945, le gouvernement provisoire français a attribué dix sièges à l’Afrique occidentale française dans la nouvelle Assemblée constituante appelée à rédiger une nouvelle Constitution française. Cinq d’entre eux seraient élus par les citoyens (ce qui n’était possible pour un Africain que dans les quatre communes) et cinq par les sujets africains. Les élections ont mis en évidence une nouvelle génération d’Africains éduqués en France. Le 21 octobre 1945, six Africains sont élus : les citoyens des Quatre Communes choisissent Lamine Guèye, le Sénégal/Mauritanie Léopold Sédar Senghor, la Côte d’Ivoire/Supérieure Volta Félix Houphouët-Boigny, le Dahomey/Togo Sourou-Migan Apithy, le Soudan-Niger Fily Dabo Sissoko et la Guinée Yacine Diallo. Ils sont tous réélus à la 2e Assemblée constituante le 2 juin 1946.
En 1946, la loi Lamine Guèye accorde certains droits limités de citoyenneté aux indigènes des colonies africaines. L’Empire français est rebaptisé Union française le 27 octobre 1946, lors de l’établissement de la nouvelle constitution de la Quatrième République. À la fin de l’année 1946, en vertu de cette nouvelle constitution, chaque territoire a été pour la première fois (à l’exception des quatre communes) en mesure d’élire des représentants locaux, bien que sur une franchise limitée, aux conseils généraux nouvellement établis. Ces organes élus n’avaient que des pouvoirs consultatifs limités, mais ils approuvaient les budgets locaux. La Loi Cadre du 23 juin 1956 a introduit le suffrage universel pour les élections tenues après cette date dans toutes les colonies françaises d’Afrique. Les premières élections au suffrage universel en Afrique occidentale française sont les élections municipales de la fin de 1956. Le 31 mars 1957, au suffrage universel, des élections à l’Assemblée territoriale sont organisées dans chacune des huit colonies (le Togo, en tant que territoire sous tutelle de l’ONU, suit à ce stade une trajectoire différente). Les dirigeants des partis gagnants ont été nommés aux postes nouvellement institués de vice-présidents des conseils de gouvernement respectifs – les gouverneurs coloniaux français sont restés présidents.
La Constitution de la Cinquième République française de 1958 a de nouveau changé la structure des colonies, passant de l’Union française à la Communauté française. Chaque territoire devait devenir un « Protectorat », l’assemblée consultative étant nommée Assemblée nationale. Le gouverneur nommé par les Français est rebaptisé « haut-commissaire » et devient le chef d’État de chaque territoire. L’Assemblée nomme un Africain comme chef de gouvernement avec des pouvoirs consultatifs auprès du chef d’État. Légalement, la fédération a cessé d’exister après le référendum de septembre 1958 visant à approuver cette Communauté française. Toutes les colonies, à l’exception de la Guinée, ont voté pour rester dans la nouvelle structure. Les Guinéens ont voté à une écrasante majorité pour l’indépendance. En 1960, une nouvelle révision de la constitution française, rendue nécessaire par l’échec de la guerre d’Indochine et les tensions en Algérie, permet aux membres de la Communauté française de modifier unilatéralement leur propre constitution. Le Sénégal et l’ancien Soudan français deviennent la Fédération du Mali (1960-61), tandis que la Côte d’Ivoire, le Niger, la Haute-Volta et le Dahomey forment l’éphémère Union Sahel-Bénin, puis le Conseil de l’Entente.